Géosciences

Les hydrates de gaz naturels sont présents dans les sédiments marins des marges continentales et dans le sous-sol des régions polaires. La stabilité de ces hydrates dépend des conditions de température et de pression, et ceux des régions arctiques sont particulièrement sensibles au réchauffement climatique.

Il parait donc nécessaire d’évaluer les quantités d’hydrates susceptibles d’être déstabilisés, ainsi que le comportement du gaz lorsque celui-ci est émis dans les sédiments. Le gaz des hydrates est produit par l’activité des micro-organismes et les mécanismes de formation ne sont pas bien connus. Ce gaz est principalement constitué de méthane, et compte-tenu du potentiel « d’effet de serre » de ce composé (34 fois plus élevé que le CO2 sur une période de 100 ans), il est important d’étudier la dynamique des hydrates de gaz afin de mieux comprendre leur rôle potentiel dans l’évolution climatique globale.
L’étude de la dynamique des accumulations (ou dépôts) d’hydrates de gaz dans les fonds océaniques et du permafrost consiste à comprendre les processus liés à leur formation, leur accumulation et leur déstabilisation dans les sédiments, en croisant les disciplines et les approches, et en combinant données de terrain, mesures expérimentales et modélisation afin de reconstruire leur histoire et prédire leur devenir. C’est seulement à partir de cette vision d’ensemble du comportement spatio-temporel des structures géologiques contenant des hydrates qu’il est possible de répondre à des problématiques plus appliquées. Ainsi, la question relative à la contribution du méthane océanique à l’évolution climatique nécessite une bonne connaissance du cycle du méthane océanique dans lequel l’accumulation d’hydrates constitue le important processus de stockage sédimentaire. De même, les impacts et les risques liés à l’exploitation éventuelle des hydrates de gaz, les problématiques de déformations des fonds océaniques et les instabilités qui peuvent en découler nécessitent d’être capable d’évaluer la capacité de stockage des hydrates, de comprendre leurs interactions avec la matrice sédimentaire pour expliquer leurs morphologies et leurs schémas de distribution, mais également de connaitre leurs propriétés thermodynamiques et mécaniques Nous avons montré dans la présentation du pôle « Sciences moléculaires » qu’une bonne prédiction de ces propriétés nécessite de bien comprendre les phénomènes à l’échelle moléculaire, et dans le pôle décrivant le « génie des procédés et technologies » que la cristallisation des hydrates en milieu poreux, tels que les sédiments marins, est fortement dépendante de la géométrie de la matrice. Ce constat s’applique également aux hydrates des corps extraterrestres, et démontre l’interdépendance des pôles et la nécessité de s’enrichir mutuellement de nos compétences et connaissances respectives.
Par ailleurs, ces hydrates de gaz peuvent jouer un rôle dans le stockage géologique du CO2 que ce soit en offshore ou deep offshore dans les sédiments marins, ou encore en onshore sous le permafrost.

Verrous scientifiques

Du point de vue fondamental, la problématique concernant le rôle des hydrates dans le cycle du carbone dans les zones océaniques ou dans les zones à permafrost mérite une réflexion plus approfondie. Il en est de même pour l’influence de ces zones à gaz sur la stabilité des fonds marins et leur contribution dans l’évolution climatique, ainsi que pour le stockage géologique du CO2. Le GdR se propose d’aborder ces problématiques en apportant des éléments de réponse à un certain nombre d’interrogations sur :

  • La compréhension des transferts thermiques dans les sédiments contenant des hydrates de gaz pour mieux comprendre les mécanismes de dissipation de la chaleur durant leur phase de formation.
  • L’évolution des propriétés mécaniques du sédiment durant la formation des hydrates et suite à une perturbation anthropique (production) ou naturelle (évolution climatique).
  • La compréhension des mécanismes de formation et de déstabilisation des hydrates grâce à des méthodes d’observation à l’échelle des pores inter-granulaires.
  • La détermination de l’influence de la distribution des hydrates, de leur taux de saturation des pores et de leur morphologie sur le comportement mécanique des sédiments.
  • Les interactions entre hydrates et matrice sédimentaire, notamment l’influence de la composition minéralogique du sédiment sur la morphologie et la distribution des hydrates de gaz dans le milieu étudié.
  • La compréhension de la thermodynamique des équilibres de phases de systèmes {méthane- dioxyde de carbone- diazote- eau- sels}, -notamment de la solubilité de l’eau dans le CO2 liquide-, et la détermination de la concentration des espèces ioniques présentes dans cette phase liquide en fonction de l’évolution du pH.
  • L’étude des solutions saumures contenant du CH4, CO2, H2S et composés organiques sédimentaires pour mieux caractériser les zones de méthanogenèse.
  • La modélisation thermo-mecano-physico-chimique : De la méthanogenèse à la déstabilisation des hydrates par des processus physiques (infiltration d’eau, changement thermique, etc.) et chimiques (dégradation des hydrocarbures, notamment le méthane), en passant pas leur croissance dans la matrice sédimentaire.
  • La compréhension à l’échelle micro et mésoscopique de la de la cinétique de formation des hydrates en milieu poreux à partir de saumures et l’impact sur la distribution des hydrates.
  • La compréhension du rôle des dépôts d’hydrates sur la taille et la répartition des communautés chimiosynthétiques.
  • La littérature confirme le rôle essentiel de la microflore dans l’équilibre dynamique des dépôts d’hydrates de gaz. Si les processus géomicrobiologiques sont relativement bien connus au-dessus des dépôts d’hydrates naturels, aussi bien en milieu marin que terrestre polaire, le rôle des micro-organismes présents au sein du dépôt d’hydrate et au-dessous de ce dernier est beaucoup moins bien décrit. La présence de micro-organismes spécifiques de ces environnements a été mise en évidence, mais les processus biogéochimiques actifs ne sont pas bien élucidés. La plupart des micro-organismes présents dans les environnements proches des hydrates de gaz n’ont pas été isolés, leur physiologie est inconnue ou seulement déduite de façon indirecte par l’étude de leurs gènes de fonction. La diversité microbienne, l’activité des micro-organismes et les processus biogéochimiques actifs sont assez bien documentés dans la zone de transition sulfate-méthane et au-dessus de cette dernière, mais beaucoup moins bien décrits dans les couches sédimentaires sous-jacentes.
  • Les interactions entre micro-organismes et hydrates de CO2 constituent un domaine d’étude largement inexploré. La très grande majorité des travaux scientifiques réalisés jusqu’à présent a été focalisée sur les hydrates de gaz naturels, alors que ces hydrates peuvent aussi jouer un rôle important pour les stockages géologiques du CO2 (en offshore ou deep offshore)

    Détection et quantification

  • Détection et quantification des accumulations d’hydrates de gaz par les méthodes géophysiques (sismique, acoustique colonne d’eau), étude de la distribution régionale.
  • Caractérisation des hydrates naturels

  • Détermination des sources de gaz.
  • Détermination de la morphologie et de la distribution locale des hydrates par des méthodes non destructives (observations visuelles, microscopie optique, imagerie par résonnance magnétique, caméra thermique, micro-tomographie aux rayons X, spectroscopie Raman, etc.).
  • Détermination des zones de transformations chimiques associées aux accumulations d’hydrates (dégradation des hydrocarbures, précipitation de carbonates, dissolution de barytine, etc.).
  • Estimation ou mesure des flux de gaz.
  • Modélisation et simulation de la dynamique géochimique des accumulations d’hydrates.
  • Propriétés mécaniques

  • Caractérisation mécanique in situ en laboratoire.
  • Modélisation et simulation du comportement mécanique des sédiments
  • Micro-biologie

  • Etude des écosystèmes associés aux zones à hydrates de gaz.
  • Le gaz stocké dans les hydrates est principalement d’origine microbienne. La communauté scientifique internationale engagée dans l’étude des processus microbiologiques associés aux hydrates de gaz compte des équipes très actives, organisées en réseaux de collaborations, et qui travaillent principalement sur les processus d’oxydation du méthane dans la colonne sédimentaire et moins sur la méthanogenèse. Plusieurs laboratoires membres du GdR sont équipés de dispositifs permettant de cultiver et d’étudier les micro-organismes sous pression. Cependant, à ce jour, aucune publication ne porte sur l’étude en laboratoire des interactions entre les micro-organismes et des hydrates de gaz en bioréacteur.
    Le GdR se propose d’aborder cette problématique en y apportant des éléments de réponse. Un programme de recherche basé sur une approche expérimentale pourrait générer des résultats originaux et complémentaires des données issues d’observations in situ. Elle devrait cependant s’intégrer dans un projet collaboratif impliquant des équipes possédant une expérience reconnue dans le domaine et des moyens permettant d’accéder à des échantillons fraîchement prélevés en environnement naturellement riches en hydrates.

    Applications

  • Stabilité des fonds marins et aléas géologiques
  • Protection des écosystèmes chimiosynthétiques.
  • Ressource énergétique potentielle
  • Evolution climatique

Responsables :
Anh-Minh TANG – Laboratoire Navier UMR 8205 CNRS, Ponts ParisTech
André BURNOL – BRGM, Orléans